L’évènement prend place pendant la guerre des Romains contre les Lusitaniens, un peuple de la Péninsule Ibérique présenté par les auteurs anciens comme difficile à pacifier. Cette mission revint, entre autres, à Servius Sulpicius Galba qui, comme nous le raconte Appien, usa d’un stratagème pour massacrer plusieurs milliers de Lusitaniens. C’est le seul récit détaillé de ce massacre, mais les sources sont nombreuses à relater le procès pendant lequel Galba dut rendre des comptes à son retour à Rome. En effet, se posa la question du non respect de la fides (la bonne foi) engagée lors de la reddition des Lusitaniens et qui aurait dû les mettre à l’abri. Le texte rappelle qu’ils étaient amis et que cette amitié était garantie par des serments passés au nom des dieux. Le sacrilège pouvait être dénoncé. Tous les Lusitaniens ne seraient pas morts, certains auraient été vendus comme esclaves (les femmes et les enfants ?). Ces survivants suscitèrent l’émoi de certains sénateurs romains; Caton en profita pour dénoncer aussi le massacre. Galba se défendit en avançant l’argument de la prévention : les Lusitaniens allaient le trahir. Mais selon Caton, l’intention ne faisait pas l’acte. Galba ne fut cependant pas condamné, certainement grâce à des soutiens politiques, un certain pragmatisme vis à vis de l’absence de preuve et de l’impossibilité de revenir en arrière et peut-être enfin, comme le pense Appien, après avoir acheté son innocence.
Ce massacre a pris une forme courante dans l’histoire des guerres : une exécution de masse parfaitement orchestrée. Dans un premier temps, il s’est agi de regrouper les victimes sans les inquiéter grâce au prétexte de la distribution de terres. Dans un second temps, elles sont encerclées (piégées) et assassinées par les soldats de Galba. La spécificité de cet événement réside dans le triple massacre, ce qui était risqué car cela pouvait mettre en péril l’effet de surprise et de fait certains ont pu y échapper. Pour l’historien, le stratagème est déplorable car il a donné des arguments supplémentaires aux Lusitaniens pour durcir la résistance, notamment derrière le leader Viriathe. La guerre dura jusqu’à la mort de ce dernier en 139 et fut une des plus difficiles des guerres romaines. Cela renforce la “culpabilité” de Galba. Le récit insiste ainsi sur la personnalité de l’imperator, qui par ce massacre pouvait achever plus rapidement sa guerre et donc faciliter son triomphe. Appien dénonce donc surtout le cumul des vices : cupidité, perfidie, impiété. Au-delà de l’erreur stratégique, il est moralement condamnable pour avoir mis en péril la guerre romaine en ne respectant pas la fides. En revanche, le massacre en soi n’est pas dénoncé par l’historien.
POUR CITER CE COMMENTAIRE : NATHALIE BARRANDON, “GALBA ET LE MASSACRE DES LUSITANIENS”, WWW.PARABAINO.COM MIS EN LIGNE LE 11/07/2021
Après la défaite du roi Nabis, Sparte est forcé de devenir membre de la Ligue achéenne en 192. Plus tard, au printemps de l’année 188 av. J.-C., à cause d’un soulèvement spartiate contre les Achéens, Philopœmen intervient à Sparte pour exiger la capitulation des responsables de la sédition. Malgré les assurances de leur sécurité, parmi ceux qui se présentent dix-sept sont brutalement lapidés, tandis que soixante-trois autres sont morts après un procès sommaire. Le lieu exact du massacre, Kompasion, n’est cependant révélé que plus tard (XXXIX, 36, 3). Un rôle essentiel est joué par les exilés spartiates, qui combattent dans les rangs des Achéens et jouent le rôle de provocateurs en suscitant un affrontement contre leurs propres compatriotes envers lesquels ils nourrissent des sentiments de vengeance. Au total, quatre-vingts citoyens spartiates ont péri dans les opérations. Le nombre total de victimes est rapporté de la même manière par Plutarque (Plut. Philop. 16, 4), qui ajoute également le témoignage d’Aristocrate de Sparte (FGrHist 591 F4), qui mentionne le nombre plus élevé de 350 victimes (probablement une exagération due à l’orientation pro-spartiate de ce dernier). On notera que dans la version de Pausanias, il n’est pas question d’exécutions et que trois cents spartiates furent chassés du Péloponnèse (Paus., Per., VIII, 51, 3).
En outre, Philopœmen fait démolir les murs qui avaient été construits récemment par le roi Nabis et commande de faire sortir du pays laconien les auxiliaires étrangers et les esclaves affranchis. Enfin, il abroge les lois et les coutumes en les remplaçant par les lois achéennes, forçant les Spartiates à renoncer à leur identité spartiate. L’abolition de la morale et de l’ancienne discipline datant de Lycurgue (Lycurgi leges moresque) a sûrement été la mesure la plus humiliante pour les Spartiates. La ville, privée des illustres coutumes et normes est dramatiquement décrite par Tite-Live comme une civitas enervata, complètement dépourvue de toute vigueur vitale, et forcé de s’assimiler politiquement et culturellement à la ligue achéenne. L’image utilisée par l’historien pour décrire le polis prostré est également présente chez Plutarque, qui compare l’acte de Philopœmen au fait de couper les nerfs de la ville (cfr. Philop. 16, 6).